mes textes disponibles via Blogger

5 février 2025

À la mémoire de John de Bry

Archéologie de la piraterie

Le temps passe, et aussi les gens. Chaque personne qui quitte ce monde, que l'on connaît parfois juste de nom ou de réputation, nous rappelle combien la vie est courte et combien le temps file inexorablement. On se dit comme ça, « Tiens, un tel qui est mort! », et cette pensée, un peu égoïste, s'insinue aussitôt à l'esprit : « Ma foi, je deviens vieux! », et puis on passe à autre chose. En voilà un qui vient tout juste de partir, et pour lequel je ferai pourtant une exception en mentionnant ici son décès, et vous comprendez aisément pourquoi.

Je ne connaissais pas personnellement l'historien et paléographe américain John de Bry, mais c'est un chercheur dont j'ai croisé le nom à plusieurs reprises au cours du dernier quart de siècle. Par son travail, il a contribué certainement à dépoussiérer un peu l'histoire des flibustiers, ou si l'on veut des pirates. Pour lui rendre hommage, je laisse ici la parole à ceux qui l'ont véritablement côtoyé, ses amis et collègues de l'association Archéologie de la Piraterie. C'est un bel hommage alors pourquoi s'en priver. Voici donc ce que Jean Soulat et son association partageait sur leur page Facebook, ce mercredi 5 février :

« Chers amis,

« Nous venons d'apprendre avec une grande tristesse le décès de notre collègue et ami John de Bry qui avait fondé avec Jean Soulat le programme de recherche devenu Association, Archéologie de la Piraterie. Nous présentons nos sincères condoléances à sa famille.

« Détenteur d'un doctorat à l'EPHE, John de Bry était un grand historien, paléographe et archéologue franco-américain, spécialiste des épaves, qui a pu mettre ses compétences aux services des plus belles découvertes archéologiques sous-marines notamment l'épave de La Belle qui a fait naufrage en 1686 ou l'épave du Whydah Galley coulé en 1717.

« Tout au long de sa vie, il a toujours multiplié les collaborations avec de nombreux chercheurs en matière d'expertise d'objets venant des épaves des 17e-18e siècles notamment sur l'île de Sainte-Marie dans les années 2000. C'est clairement grâce à John de Bry que nous menons nos recherches sur l'île aujourd'hui.

« Il avait fait la connaissance de Jean Soulat en 2018 pour la préparation de l'ouvrage Archéologie de la Piraterie, aux éditions Mergoil, fin 2019. Cette collaboration a permis de créer notre programme de recherche. Fruit de ce travail, un premier article en anglais a été publié en 2019 dans le Journal of Caribbean Archaeology du prestigieux Florida Museum. Suivront plusieurs articles dont le dernier, paru en mars 2024, dans la revue Afriques, avec la présentation de nos recherches menées en mai 2022 à Sainte-Marie où nous avions fait venir John de Bry sur place, son dernier voyage sur l'île.

« Il est d'ailleurs présent dans le documentaire La véritable histoire des pirates, de Gedeon Programmes, qui met en lumière les investigations de 2022. Encore une fois, c'est grâce à John que nous devons ce film puisqu'il avait toutes les connexions françaises et malgaches, une pensée pour Jean-Aimé Rakotoarisoa, à Stéphane Millière et Michel L’Hour qui l'ont bien connu.

« Il laissera un grand vide dans la thématique de recherche qu'est l'archéologie de la piraterie. Et nous garderons en souvenir les bons moments passés ensemble.

« John, tu vas nous manquer. Merci pour tout.

« Bon vent au gré des flots Matelot. »

28 janvier 2025

Notes de « visionnement » : Les femmes pirates

gravure de Benjamin Cole (1724)

L’épopée des femmes pirates : les filles du vent
Documentaire historique
France, 2024
90 minutes
Réalisation : Laurence Thiriat et Frédéric Malègue
Scénario : Éric Menu et Laurence Thiriat
Production : Goyaves, Amour Fou Luxembourg et Film Fund Luxembourg pour NDR, en collaboration avec l'ORF, France TV et Arte.
Première diffusion (en streaming) : Arte, 13 janvier 2025.
https://www.goyaves.com/les-femmes-pirates/


Un an déjà presque sans un seul petit billet de blogue! Ce n'est pas faute de matière, car j'ai plusieurs textes en chantier, mais bien faute de temps pour les compléter. Il faut dire aussi que le monde d'après la grippe chinoise me pèse, moralement, et depuis la dernière année, financièrement, sans compter les petits soucis qui s'accumulant les uns sur les autres finissent aussi par peser, mais c'est la vie. Il y a des hauts et des bas. Et puis quand on se compare avec pire que soi, on finit par se dire : je suis privilégié tout compte fait. N'est-ce pas?

N'empêche, s'il n'y avait pas eu toutes ces DEI et autres stupidités du genre telle l'écriture inclusive, digne du calendrier révolutionnaire, avec un écoeurant parfum d'ère soviétique. Que dire encore de la sempiternelle crise climatique qu'on nous agite tel un nouvel Apocalypse, et qui sert de prétexte aux investissements les plus fous et les plus inconséquents, et à des taxes nouvelles et inédites. Il y a eu aussi, et non des moindres, ces milliards dépensés durant la fameuse pandémie, et cette immigration volontairement exagérée (du moins ici) qui ont contribué beaucoup à l'inflation. Ce qui fait que ceux qui comme moi appartiennent à la classe dite moyenne s'appauvrissent de jour en jour, et que dire de ceux qui sont plus pauvres... Nos politiciens auraient avantage à faire appel à leur sens commun, et moins à l'intelligence artificielle.

C'est triste à dire, mais la seconde élection de Trump comme président des États-Unis est peut-être ce qu'il fallait pour secouer nos sociétés qui se sont engoncés dans un carcan quasi-religieux depuis le début du second millénaire. Espérons toutefois que le remède ne soit pas pire que le mal... mais aux grands maux, les grands remèdes, paraît-il...

Donc, je suis d'humeur méchante... De quoi voulais-je vous parler? Ah oui! Ce documentaire que j'ai visionné sur les femmes pirates. Je ne serai pas très gentil là non plus. Avant de commencer, je dois d'abord faire ce qu'il est convenu d'appeler dans le jargon « une déclaration d'intérêts ». Il y a presque deux ans, j'ai été approché par l'un des scénaristes du documentaire pour y participer à titre d'expert, sur recommandation de quelqu'un pour qui j'ai beaucoup de respect. J'ai cependant refusé pour plusieurs raisons qui me sont personnelles, mais que je peux résumer ainsi : la caméra et le micro ne sont pas ma tasse de thé. Bref, je suis meilleur à l'écrit. Je ne voulais donc pas faire dépenser inutilement temps et argent à ces gens-là pour une entrevue qui risquait d'être ratée. À chacun ses petits caprices. Une autre raison qui a motivé, accessoirement, mon refus, était le sujet du documentaire. Il me mettait mal à l'aise. Par mes recherches, je sais que pour toute la période que j'ai étudiée, il n'y a aucune femme pirate ou « flibustière » dans les Antilles, hormis deux des vedettes du documentaire, Mary Read et Anne Bonny, membres de l'équipage d'un petit pirate (John Rackham) qui serait demeuré insignifiant sans la curiosité que suscita la présence de ces deux femmes à ses côtés. Ce qui m'étonna encore plus, et me confirma dans mon malaise, c'est qu'outre ces deux piratesses avérées, le documentaire devait également aborder — et ce fut d'ailleurs le cas — la carrière « flibustière » de Marie Dieulveult, seconde épouse de Laurent de Graffe, l'un des plus fameux marins de la mer des Antilles de la seconde partie du XVIIe siècle.

Quelques mots ici concernant De Graffe. D'origine hollandaise, il s'était d'abord établi à Tenerife, aux Canaries, où il était marié. En 1676, lors de la prise du navire espagnol à bord duquel il servait comme maître-canonnier, il avait été fait prisonnier par des flibustiers de Saint-Domingue. Ses qualités étaient telles que, tout prisonnier qu'il fût alors, le sieur de Grammont, l'un des deux capitaines qui l'avaient capturé, lui avait donné le commandement du fort défendant l'entrée du lac de Maracaïbo lors de la campagne de six mois que les flibustiers français y firent en 1678. Au retour de cette expédition, le même Grammont l'avait promu capitaine d'un petit bâtiment. Devenu chef flibustier, De Graffe s'était signalé par la prise (1682) d'un navire de guerre espagnole portant 120 000 écus destinés aux garnisons et fortifications de Santo Domingo et de San Juan de Puerto Rico. Il devint ensuite l'un des plus importants capitaines corsaires des Antilles, participant entre autres aux prises de Veracruz (1683) et de Campêche (1685). Nommé major pour le roi (1686) à Saint-Domingue, il fut promu lieutenant de roi (1691) dans la même colonie. Après que son épouse canarienne eut fait annuler leur union, De Graffe s'était remarié, en 1693, avec Marie Dieuleveult, veuve possédant des terres au Cap et au Quartier-Morin (côte nord de Saint-Domingue), héritées de ses deux précédents époux.

Voici ce que j'écrivais au sujet de cette seconde madame de Graffe à la personne de chez Goyaves (la société productrice du futur documentaire) avec qui j'ai échangé quelques courriels concernant ma possible participation au projet. C'était en avril 2023 :

« ...cette histoire voulant que Laurent de Graffe ait amené son épouse en course avec lui ne repose que sur du vent. Au mieux, la dame a-t-elle pu voyager à bord d'un navire commandé par son mari, ou appartenant à celui-ci (quelque part entre la date de leur mariage en 1693 et sa capture par les Espagnols en 1695) pour passer d'un quartier de Saint-Domingue à l'autre, ce qui est, par ailleurs, invérifiable.

« Pour savoir d'où provenait cette fable, j'ai vérifié autant dans les manuscrits du Jésuite Jean-Baptiste Le Pers (réputé pour ses nombreuses erreurs) que dans l'Histoire de Saint-Domingue, de son confrère Charlevoix, mais je n'y ai absolument rien trouvé. Nul besoin de vous dire qu'il n'y a rien à ce sujet dans les archives non plus.

« En fait, la référence la plus ancienne à cette fable se trouve dans Léon Treich, Les Gentilshommes de la flibuste (1944) :

...elle suivit Laurent De Graff dans tous ses embarquements... demeurant sur le pont des bateaux au milieu des plus rudes canonnades. Les flibustiers la considéraient comme une sorte de mascotte... et il lui était toujours attribué une part de butin.

« C'est ainsi que Francis Lacassin cite Treich dans sa préface à une édition moderne et tronquée du livre d'Exquemelin (Éditions J'ai Lu, 1984). Voilà, c'est encore un exemple, parmi bien d'autres, malheureusement, démontrant qu'il ne faut pas se fier à ce qui a été écrit sur les flibustiers avant la fin du siècle dernier. J'avoue m'y être laissé prendre il y a plusieurs années, et je comprends maintenant pourquoi mon défunt collègue Jacques Gasser, dans son dictionnaire des flibustiers, ne mentionnait pas que De Graffe amenait son épouse avec lui en course. Bref, tout ça est à mettre au panthéon des arnaques aux côtés du capitaine Borgnefesse, de T'Sterstevens et Alaux. »

Que Marie Dieuleveult ait eu un fort caractère et beaucoup de tempérament, je le concède volontiers, mais de là à en faire une « flibustière », il y a un monde, qu'on a ici franchi allègrement au mépris non seulement de toute véracité historique, mais de toute vraisemblance!

Il est un peu dommage, par ailleurs, que le documentaire ait brossé un portrait si stéréotypé de Laurent de Graffe, personnalité beaucoup plus complexe que ce qui en est dit, qui songea plusieurs fois à quitter les Français au cours de sa carrière, soit pour joindre les Anglais, ou pour retourner servir les Espagnols, ayant eu des offres à cet effet de ces deux nations. Ce fut d'ailleurs le cas au moment où sa femme fut capturée au Cap en 1695. Enfin, il n'était pas le sujet du documentaire (bien qu'il en mérite un à lui tout seul), mais seulement l'un de ses « accessoires masculins ».

Beaucoup plus intéressant aurait été de révéler le rôle que certaines femmes jouèrent en arrière-plan dans l'univers masculin de la flibuste et de la piraterie. Par exemple, le cas de Marthe Baudry, l'épouse de Jean-Baptiste Ducasse, ancien négrier et corsaire, gouverneur de Saint-Domingue (1691-1700) contemporain et supérieur du sieur de Graffe. Depuis Dieppe, elle fut la procuratrice de son mari en France, et de bien d'autres, et on peut la qualifier de véritable « femme d'affaires » de son temp, à l'exemple de sa mère Marthe Chauvel, elle-même fille et veuve d'armateurs, et elles ne sont pas les seules. À ce titre, le véritable rôle de Marie Dieuleveult auprès du lieutenant de roi De Graffe est d'avoir fait de lui, grâce aux terres acquises aux décès de ses deux précédents maris, un riche et prospère planteur à Saint-Domingue, ce que le Hollandais n'avait jamais été jusques là. Évidemment, c'est beaucoup moins glamour que d'être une piratesse ou une amazone.

La trame des quatre histoires présentées dans L’épopée des femmes pirates — les trois autres étant celles de Mary Read et Anne Bonny, ainsi que de Louise Antonini, qui servit à bord de navires de guerre français sous la République et l'Empire — provient du livre de Marie-Ève Sténuit, Femmes pirates: Les Écumeuses des mers (Paris, Éditions du Trésor, 2015), p. 49-88 (Read et Bonny), 93-106 (Antonini) et 163-171 (Dieuleveult). D'ailleurs, Mme Sténuit, qui est historienne de l'art et archéologue (!), est le principal expert interviewé durant le documentaire. Elle prête bien des intentions à ses héroïnes, et ses propos, ainsi que celle de la narratrice, sont fortement teintés de féminisme, et je n'ai pu m'empêcher de faire un parallèle avec les pires moments des Secrets d'histoire, où l'on voit de l'homosexualité là où il n'y en a pas. Ce n'est plus de l'histoire, mais une sorte de discours politique qui s'alimente à tout ce qui peut le conforter, quitte à perpétuer des faussetés et dire des inepties. Que de talents et d'argent gaspillé. Heureusement, en ce qui concerne ce documentaire, les interventions des historiens Philippe Hrodej, toujours aussi pertinent, et Kevin Porcher, dont j'ai apprécié les textes, et maintenant les commentaires, et de Mme Dominique Rogers, que j'ai découverte à cette occasion, — chapeau bas, madame et messieurs — sauvent un peu la mise, mais à mon avis, pas du naufrage.

Enfin, avis aux producteurs de documentaires traitant de l'histoire maritime, SVP arrêtez de nous montrer des navires à voiles naviguant tout droit sur une mer calme sans aucunes voiles déployées. C'est invraisemblable. On voit bien qu'ils sont propulsés par un moteur! Pitié aussi, moins de reconstitution historique. Si vous voulez faire un film de fiction, faites-en un, mais cessez de mêler les genres, et puis revoir des séquences de combat, qui se ressemblent toutes, aux 10 à 15 minutes, c'est lassant et agaçant, un peu comme la bande-annonce d'un film que l'on visionnerait en boucle.

Cher lecteur, je vous avais prévenu. J'étais d'humeur assassine, et mon sabre, s'il est un peu beaucoup ébréché, peut encore faire mal. Bon, mes excuses à ceux ou celles qu'il aura pu écorcher. Je ne vous connais pas, et il n'y a rien de « personnel » comme on dit ici. C'est juste que vous vous êtes aventurés sur un sujet que je connais très bien, et dont j'ai toujours défendu l'intégrité.

12 février 2024

Reconciling the Impossible: the Historical Facts and the Misfortunes of Alonso Ramirez

Carlos de Sigüenza y Góngora (Mexico City, 1645-1700), “Infortunios de Alonso Ramírez. [The Misfortunes of Alonso Ramírez],” Grolier Club Exhibitions, accessed December 1, 2023, https://grolierclub.omeka.net/items/show/1672
Title page of Infortunios de A. Ramirez (1690)
Copyright © Hispanic Society of America

I hope that those who usually follow my work in French will forgive me, but the subject of this blog post, as well as the study it introduces, really requires the use of the lingua franca of our time...

Long considered a pure fiction, the Infortunios de Alonso Ramírez, a small work published in Mexico in 1690, chronicles the misfortunes of a Spaniard who was held captive by a gang of English pirates traveling in the Asiatic seas for about two years. Over the past twenty years, this work has been the subject of several studies, which tend to demonstrate that it is a partially true story. Accordingly, some scholars posited that its author was a prisoner aboard the Cygnet, a ship on which the famous William Dampier served, as well as in the same capacity aboard a second pirate ship called The Good Hope. However, Ramírez's account is replete with so many half-truths and lies that it is difficult, if not almost impossible, to arrive at any certainty, and this reduces its historical importance. But reading the scholars who have examined the Infortunios so far, one could believe the opposite and consider it a valuable testimony for the study of 17th-century piracy. In fact, this erroneous perception comes directly from their failure to paint a relatively complete and fair picture of the adventures of the historical pirates they assimilated to those of Ramírez's account, an essential point in order to draw reasonable hypotheses about his Infortunios. This text will attempt to fill that gap. The exercise will be done not only using the unavoidable narratives of Dampier and documents from the Archivo General de Indias relating to the Philippines, but above all using other ones coming mainly from the archives of the defunct Dutch East India Company, which were not very accessible or little used until now. In doing so, new (and better) foundations will be laid for the future study of the historicity of Ramírez's "Misfortunes", which will be, in any case, particularly difficult. It will also be an opportunity, in the light of the same sources, to reassess the voyage of the Cygnet in Asia, as well as the less known one of Captain John Eaton's company, to which some of the pirates of the Good Hope had belonged.

You can access this study here:

Be aware that this is my own translation of the original text that I first wrote in French. One of my acquaintances was kind enough to review it, pointing out the most important mistakes. The result is certainly not perfect, and further editing would have been required. I therefore pray the reader to be indulgent. However, any suggestions for enhancing or correcting this paper will be greatly appreciated. And as always, any comments or questions regarding the contents are welcome. Good reading and... discoveries!

3 janvier 2024

Nouvelles perspectives pour l'étude d'Exquemelin

Exquemelin - J'ai Lu

C'était, à la fin d'un autre siècle, à une époque où je lisais beaucoup, une époque où le mot « internet » ne faisait pas encore partie de la langue commune. Ma bourse ne me permettait que rarement d'acheter des livres neufs. Je fréquentais donc les bouquinistes de la ville de Québec, un samedi, un dimanche, ici et là. C'est à l'une de ces occasions que je mis la main sur un ouvrage dont le titre attira aussitôt mon attention, Histoire des Frères de la côte. J'en feuilletai quelques pages, y lisant en diagonale les aventures de pirates français et anglais des Antilles. Ce fut mon premier contact avec « Alexandre Olivier Exmelin », car telle était la forme sous laquelle figurait le nom de l'auteur dans cette édition de poche, « moderne » et largement tronquée, de son fameux Histoire des avanturiers flibustiers qui se sont signalez dans les Indes. J'ai encore le livre dans ma bibliothèque [image de couverture ci-contre]. Je ne l'ai pas lu depuis fort longtemps, lui préférant maintenant les éditions originales et complètes du XVIIe siècle que l'on peut trouver facilement sur... internet. C'est devenu un souvenir, une sorte de curiosité.

C'est pourtant grâce à cet ouvrage, à son auteur, Alexandre Olivier Exquemelin, de son nom exact, que je dois ma passion pour les flibustiers et leur histoire. Certes, il a été détrôné par William Dampier comme mon chroniqueur favori... question de goût, sans doute. Pourtant tout comme l'oeuvre de Dampier, celle d'Exquemelin, malgré certains défauts, demeure un témoignage incontournable pour qui étudie l'histoire des flibustiers, bien qu'elle soit, elle aussi, plus que cela, puisqu'elle contient des renseignements intéressant les sciences naturelles, la géographie et l'ethnographie de l'Amérique du XVIIe siècle. Mais le Français m'a toujours paru trop insaisissable. Il disait peu de choses de lui-même, et au fil de mes travaux, je m'aperçus que plusieurs éléments biographiques concernant l'auteur se trouvant, entre autres, dans la préface de ma version moderne tronquée de son oeuvre ne collaient tout simplement pas : je sais maintenant que ces éléments biographiques sont quasiment tous faux.

De Americaensche zee-roovers

En effet, depuis plus de trois siècles, bien des absurdités et des faussetés ont été écrites à la fois sur l'auteur et sur son oeuvre. Il y a quelques années, feu Jacques Gasser et moi, un peu en parallèle, avions commencé à lever le voile sur l'auteur. Nous avions même l'intention d'écrire ensemble un texte sur ces découvertes. Mais comme je ne peux me satisfaire de peu en matière de flibustiers, je me suis mis à analyser les diverses versions et traductions originales de l'oeuvre d'Exquemelin, car là aussi il y avait des indices sur la vie de l'homme, ou du moins des éléments permettant de mieux le comprendre. Or, en octobre 2020, le décès de Jacques a mis un terme à ce projet. Il faut dire qu'il jugeait ma version préliminaire du texte beaucoup trop long!

L'an passé, j'ai finalement proposé mon étude à la revue HISTOIRE(S) de l'Amérique latine (HISAL), qui avait déjà publié mon article sur Étienne Massertie. La voici donc, cette étude sur Exquemelin dans le volume 16 de HISAL. Je l'ai faite à la lumière de renseignements inédits, qui montre notamment qu'il était polyglotte et catholique, qu'il fut engagé dans la traite négrière et que, dans les dernières années de sa vie, il résidait à Saint-Malo. En parallèle, j'ai ré-analysé les premières éditions de son oeuvre. Le texte qui en résulte ne prétend pas donner une biographie complète de l'homme, pas plus qu'il ne constitue une étude exhaustive de ses écrits. Son objectif, plus modeste, est de proposer un nouveau canevas pour tous ceux qui étudieront Exquemelin à l'avenir:


Exquemelin, a reassessment

It was, at the end of another century, a time when I read a lot, a time when the word "internet" was not yet part of the common language. My purse rarely allowed me to buy new books. So I used to visit second-hand book sellers in Quebec City, on a Saturday, a Sunday, here and there. It was on one of these occasions that I got the hand on a book whose title immediately caught my attention, Histoire des Frères de la côte. I leafed through a few pages, reading snippets of the amazing adventures of French and English pirates in the West Indies in the 17th Century. This was my first contact with "Alexandre Olivier Exmelin", for such was the form of the author's name in this "modern" and largely truncated pocket edition of his famous Histoire des avanturiers flibustiers qui se sont signalez dans les Indes, the French incarnation of his work. I still have the book in one of my bookcases. I haven't read it for a very long time, preferring the original and complete editions of the 17th Century, that can be easily found on... the internet. So, it has become a reminder, a kind of curiosity.

However, thanks to this book, to its author, Alexandre Olivier Exquemelin (that is his right name), I owe my passion for the buccaneers and their history. Admittedly, he was dethroned by William Dampier as my favorite chronicler... question of taste, no doubt. However, just like Dampier's work, that of Exquemelin, despite certain (and many) faults, remains an essential testimony for whoever studies the history of the buccaneers, although it is more than that, since it contains information interesting in the natural sciences, geography, and ethnography of seventeenth-century America. But the Frenchman has always seemed too elusive to me. He said very little about himself, and in the course of my own studies, I realized that much of the biographical sketch about the author (that I could read in the preface of my truncated modern version of his work) simply did not fit the facts... in the same way as the Wikipedia entries about him. I now know that this biographical sketch is almost all false.

Indeed, for more than three centuries, many absurdities and falsehoods have been written about both the author and his work. A few years ago, the late Jacques Gasser and I, somewhat in parallel, began to lift the veil on the author. We even intended to write together a text on these discoveries. But as I cannot be satisfied with little in terms of buccaneers, I began to analyze the various versions and original translations of the work of Exquemelin, because there too there were clues to the life of the man, or at least some elements for its better understanding. However, in October 2020, the death of Jacques put an end to this project. It must be said that he considered my preliminary version of our intended common text much too long!

Last year, I finally submitted my study to the journal HISTORY(S) of Latin America (HISAL), which had already published my article on Étienne Massertie. So here is my study on Exquemelin in HISAL, vol. 16. Using unpublished information, I shed a new light on the man, showing in particular that he was polyglot and Catholic, that he was later engaged in the slave trade and that, in the last years of his life, he resided in Saint-Malo. In parallel, I re-analyzed the first editions of his work. The resulting text does not claim to give a complete biography of the man, nor does it constitute an exhaustive study of his writings. Its more modest goal is to provide a new framework for all those who will study Exquemelin in the future. Good reading.... in French (!):

17 septembre 2023

L'histoire de la lagune de Términos

Carte du Yucatan, par Herman Moll, 1699
Carte du Yucatan, par Herman Moll, 1699 © John Carter Brown Library

L'automne arrive à grand pas... et je ne pense pas chômer puisque j'ai en chantier quelques projets concernant, toujours, les flibustiers des Antilles en Asie... dont un sur l'énigmatique récit d'Alonso Ramírez que j'espère déposer ici avant la fin de l'année, et puisque l'on m'a convaincu de l'écrire en anglais, il devrait être uniquement dans cette langue.

Hormis ces travaux... voilà exactement un mois, j'étais l'invité à la séance mensuelle de l'un des séminaires permanents du Centro Peninsular en Humanidades y Ciencias Sociales (CEPHCIS). C'est l'un des centres de recherche de l'université nationale autonome du Mexique, et il est situé à Mérida de Yucatán. Bon, je ne suis pas allé au Mexique, quoique cela aurait été bien tentant, d'autant plus que mon seul voyage (malheureusement comme touriste) dans ce pays, à Acapulco (le port d'escale du galion de Manille) remonte bien... à 30 ans. Tout ça c'est donc fait à distance, et c'est bien là l'un des rares avantages à long terme qu'aura eu la pandémie du virus chinois : développer à un niveau inégalé jusques là les communications audio-visuelles en direct... mais je m'égare un peu... comme toujours.

Je disais donc que ce séminaire était intitulé La Construcción Histórica de Regiones Depredadas, et le sujet de la séance à laquelle j'ai participé était la piraterie au XVIIe siècle dans la lagune de Términos, autrement appelée par les Français et les Anglais de l'époque, la lagune de Triste. C'est un sujet qui m'a toujours passionné, et que j'ai longuement étudié vers 2010-2015, avant que je ne me plonge dans les expéditions de la mer du Sud. Il demeure toujours l'un de mes favoris, et je constate que des chercheurs latino-américains pourront probablement mener à terme l'étude de ce sujet, mieux que je ne saurais le faire, et cette perspective me réjouit. C'est à deux de ces chercheurs, Victor Medina Lugo et Rodrigo de la O, que je dois d'ailleurs ma participation à ce séminaire.

Entre l'espagnol, le français et l'anglais, ce fut à la fois amusant et intéressant, mais j'ai bien regretté ne pas savoir parlé espagnol comme je sais si bien le lire... dans sa version « XVIIe siècle ». J'ai exposé comment j'étais venu à étudier l'histoire des flibustiers, etc. Nous avons ensuite échangé sur la présence des coupeurs de bois de teinture et des flibustiers dans la lagune, mais aussi ailleurs au Yucatan à la même époque.

Je tiens donc à remercier ici publiquement tous ces sympathiques universitaires et chercheurs qui m'ont accueilli lors de cette séance, à savoir :

  • Rosa Torras Conangla, du CEPHCIS, responsable du séminaire, spécialisée dans la territorialité et l'espace de la lagune de Terminos aux XIXe et XXe siècles.
  • Rodrigo Alejandro de la O Torres, de l'université autonome d'Aguascalientes, spécialiste de l'histoire de la piraterie au Yucatan aux XVIe et XVIIe siècles, avec qui j'avais correspondu précédemment.
  • Luis Mezeta, de l'université autonome de San Luis Potosis, spécialisé dans l'étude des commerçants du Yucatan de la fin du XVIIIe siècle jusqu'au début du XIXe.
  • Victor Medina Lugo, étudiant au doctorat en histoire à l'université de Tulane, avec qui j'ai échangé plusieurs fois sur la présence des flibustiers dans la lagune de Términos dans la seconde moitié du XVIIe siècle, et qui effectue d'ailleurs lui-même des recherches, qui s'annoncent prometteuses, sur le sujet.
  • Ubaldo Dzib, de l'université automone de Campeche, sociologue spécialisé dans l'étude des groupes de pouvoir et de la politique sociale dans la région de Sabancuy au XXe siècle.
  • Pascale Villegas, de la même université, dont la spécialité est la présence consulaire étrangère à Campêche et à Carmen, que je remercie particulièrement pour m'avoir servi de traductrice.

¡Muchas gracias a todos, una vez más!

30 juillet 2023

Sortir de « l'enfer de la flibuste » : des Galapagos au Siam

douane siamoise
Douane siamoise (1688)

Ceux qui ont lu la seconde édition de L'Enfer de la flibuste auront probablement remarqué qu'un groupe de neuf hommes avaient quitté le capitaine Franc Rolle aux Galapagos à la fin de l'année 1689, et qu'ils avaient traversé le Pacifique pour ensuite se disperser en Asie du Sud-Est et en Inde, sans que nous puissions savoir ce qu'ils y avaient fait et comment s'était déroulé leur voyage. Ça ne m'avait pas réellement sauter aux yeux, avant que je n'entreprenne la rédaction du texte que je présente ici, mais ces neuf flibustiers furent quand même les premiers Français, en tant que groupe, à traverser, d'est en ouest, la grande « mer du Sud ». Certes, les Espagnols, bien évidemment, mais aussi les Anglais et les Néerlandais, l'avaient fait bien avant, ce qui diminue beaucoup l'importance de cette première... Cependant, j'ai toujours pensé qu'il aurait été interessant d'en apprendre davantage sur ce qui leur était advenu après... après être sorti de ce que Frantz Olivié a appelé « L'Enfer de la flibuste ». Et l'année dernière, au hasard d'une bête recherche, j'ai trouvé dans les archives de la compagnie des Indes néerlandaises la copie d'une lettre de deux missionnaires français, et cela m'a lancé sur une nouvelle piste. J'ai ainsi commencé à lever un peu le voile sur les aventures en Asie de ces neufs hommes, surtout celles d'un certain Antoine de Chazelle. Ici, le lecteur ne doit pas s'attendre à des choses très exceptionnelles, et à dire vrai, il n'est plus question de piraterie, mais de l'intégration d'un ancien flibustier dans les réseaux commerciaux asiatiques, avec en prime quelques considérations d'ordre matrimonial. D'autre part, j'ai profité de l'occasion qui s'offrait, compte tenu du sujet principal, pour faire une revue sommaire des traversées du Pacifique entreprises par des flibustiers de 1685 à 1705.

Le texte qui en a résulté ne me satisfait toutefois qu'à moitié, parce que d'une part j'ai voulu y inclure tout ce que j'avais découvert — ce qui n'est pas nécessairement la meilleure des idées car, parfois, je l'avoue, c'est plus ou moins intéressant —, et parce que d'une autre, il a bien fallu que je mette en contexte plusieurs éléments qui m'étaient plus ou moins familiers. Comme j'ai d'autres projets en chantier, lesquels (je l'espère) seront plus achevés que celui-ci, j'ai décidé de livrer au lecteur dans l'état où elles sont mes « notes de recherche » sur ces neuf flibustiers. Et ce sont des notes volumineuses puisque l'ensemble compte environ 35 000 mots, incluant les autres notes, celles de bas de page, qui sont conséquentes, et que je peux me permettre, lorsque je publie ici, d'utiliser avec prodigalité, toujours avec ce même objectif en tête : faire preuve de transparence quant aux sources que j'utilise et permettre ainsi plus facilement, à ceux qui le souhaitent, de corroborer mes propos. Les voilà donc ces fameuses notes de recherche, sur lesquelles j'ai travaillé pendant plus de six mois, épisodiquement bien sûr :

2 avril 2023

Petite trivialité concernant Dampier

Ces derniers mois, j'ai prospecté les archives néerlandaises en ligne, particulièrement celles de la Verenigde Oostindische Compagnie (VOC), la compagnie néerlandaise des Indes orientales. Bientôt — je l'espère —, je partagerai sur ce blogue quelques unes de mes découvertes... à tout le moins des textes sont en cours de rédaction pour d'éventuelles diffusions. L'un d'eux aura pour sujet la première traversée, d'est en ouest, de la grande mer du Sud, c'est-à-dire l'océan Pacifique, par des Français, qui étaient évidemment des flibustiers. En me documentant sur ce sujet, j'en suis venu à m'intéresser à ces traversées faites par des flibustiers à la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle. Parmi les archives de la VOC, j'ai ainsi trouvé de nombreux documents relatifs à trois de ces traversées effectuées en 1705 par des membres de l'équipage du corsaire anglais The Saint George. Dans le cadre de la guerre de la Succession d'Espagne, cette frégate et une galère nommée The Cinque Ports avaient été armées en Angleterre, sous une commission de la reine Anne, pour donner la chasse aux Espagnols et aux Français en mer du Sud. Cette expédition était commandée en chef par le fameux William Dampier, lui-même étant capitaine du The Saint George.[1] De nos jours, ce voyage est surtout connu à cause de l'un des marins du Cinque Ports qui choisit de se dégrader volontairement sur l'une des îles de l'archipel Juan-Fernández, l'Écossais Alexander Selkirk, dans lequel on voit aujourd'hui l'archétype de Robinson Crusoé.[2]

L'expédition de Dampier, qui en était à son second commandement en mer, fut un véritable fiasco, et ce malgré quelques prises faites sur les Espagnols. Il se brouilla d'abord avec Thomas Stradling, le commandant du Cinque Ports. Ensuite, à deux reprises, au Nicaragua, il vit une partie de son propre équipage l'abandonner pour traverser le Pacifique. La première fois, ce furent une vingtaine d'hommes, conduits par le premier contremaître du Saint George, John Clipperton, qui s'embarquèrent dans une petite barque de 40 tonneaux pour entreprendre ce voyage.[3] Environ deux mois plus tard, ce fut au tour d'une trentaine d'autres, dont le chef était John Ballehache, maître de la frégate, et qui incluait le subrécargue de l'expédition, Edward Morgan, de prendre la même direction, cette fois dans une prise espagnole un peu plus grande.[4]

Pour finir, après avoir abandonné le Saint George, Dampier et le reste de son équipage (soit 28 hommes) quittèrent eux aussi, à bord d'une petite prise, les côtes pacifique des Amériques, et après une traversée de plusieurs mois, ils arrivèrent le 13 novembre 1705, à l'embouchure de la rivière Simuay, dans le sultanat de Maguindanao, à Mindanao, l'une des Philippines. C'était à cet endroit que 19 ans auparavant, le capitaine Charles Swan (sous les ordres duquel servait alors Dampier) était lui-même venu faire escale après sa propre traversée du Pacifique. Dès le lendemain, 14 novembre, Dampier vint jeter l'ancre à la rade, puis il alla visiter deux agents de la VOC venant de Ternate, dont le navire y mouillait depuis déjà plusieurs semaines. Ces deux officiers néerlandais, envoyés par le gouverneur des Moluques en mission commerciale et diplomatique auprès du sultan de Maguindanao, ne manquèrent pas de rendre un compte rendu détaillé de leurs échanges avec le capitaine anglais.[5] Parmi d'autres sujets qui pourraient intéresser les historiens, leur rapport décrit Dampier comme étant :

William Dampier, par Thomas Murray, v. 1697-1698
William Dampier © National Portrait Gallery, Londres, NPG 538
« une personne de taille moyenne, mais quelque peu maigre de corps et de visage, avec un grand nez aquilin et une barbe grise, paraissant âgé d'une cinquantaine d'années, et dont l'auriculaire droit semblait être amputé ou coupé juste au-dessus de la troisième ou dernière phalange. »[6]

C'est l'une des rares — sinon la seule — descriptions physiques que nous possédons de Dampier. Par le propre témoignage de ce dernier, nous savons qu'il était effectivement un homme maigre, du moins lorsqu'il se comparait à son ancien chef, le capitaine Swan, personnage bien en chair.[7] Certes, c'était 20 ans auparavant, mais, par chance, quelques années avant son voyage comme capitaine du Saint George, le peintre écossais Thomas Murray avait réalisé le portrait de l'ancien flibustier. C'était une commande du médecin et botaniste irlandais Hans Sloane (1660-1753), membre de la Royal Society et grand collectionneur de curiosités, qui s'était pris d'amitié pour Dampier. Ce portrait confirme également une autre caractéristique physique, notée par les deux officiers de la VOC, soit son grand aquilin. Il montre également la main droite du flibustier tenant le premier volume de ses Voyages, mais on n'y voit que le pouce.[8] Alors qu'en est-il du petit doigt amputé en partie de cette main? L'un des prisonniers faits par Dampier lors de sa croisière aux côtes pacifiques de l'Amérique espagnole, déclara à Lima que celui-ci l'avait perdu lors d'une précédente expédition en mer du Sud.[9] Il est toutefois impossible de savoir si c'est lors de son premier voyage dans cette mer, faite par le Darien, avec les capitaines John Coxon, Richard Sawkins puis Bartholomew Sharpe (1680-1681), ou lors de son deuxième sous les ordres d'Edward Davis puis de Swan (1684-1686). Dans tous les cas, ni dans son manuscrit, ni dans les versions publiées de son livre, il ne parle de ce handicap et comment il perdit ce bout de doigt.


Notes

[1] L'essentiel de cette expédition est bien rapportée par William Funnell, A Voyage Round the Word, containing an Account of Captain Dampier's Expedition into the South-Seas in the Ship St George, in the Years 1703 and 1704 (Londres: James Knapton, 1707), 300 p.

[2] Concernant le séjour volontaire de Selkirk à l'île Juan-Fernández más a Tierra (aujourd'hui improprement appelée Isla Robinson Crusoe), voir Woodes Rogers, A Cruising Voyage Round the World: First to the South-Seas, thence to the East-Indies, and homewards by the Cape of Good Hope, begun in 1708, and finish'd in 1711 (Londres : Andrew Bell et Bernard Lintot, 1712), p. 124-129. À écouter aussi le podcast de Daniel Fiévet et Cécile Laffon, « Alexander Selkirk, le vrai Robinson Crusoé », série Naufragés - une histoire vraie, France Inter, 3 janvier 2023 [en https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/naufrages-une-histoire-vraie/alexander-selkirk-le-vrai-robinson-crusoe-7731320 (consulté le 1er avril 2023).

[3] NL-HaNA VOC/inv.nr. 1699/fol. 1304-1306, relation de Christoffel Wagenaar, Batavia, 14 janvier 170; et Funnell, A Voyage Round the Word, p. 67-68.

[4] NL-HaNA VOC/inv.nr. 721/résolution du gouverneur général et du conseil de Batavia, 13 décembre 1705, et surtout NL-HaNA VOC/inv.nr. 1710/p. 61-66, lettre du gouverneur Balthasar Coyett et son conseil au gouverneur général et au conseil de Batavia, Amboine, 8 juin 1705; et Funnell, A Voyage Round the Word, p. 86, 221-249.

[5] NL-HaNA VOC/inv.nr. 1727/p. 269-443, relation journalière du voyage à Maguindanao de Pieter Kloek et Nicolaas Ploos, du 4 septembre au 18 décembre 1705.

[6] Idem, p. 365 [en ligne] https://www.nationaalarchief.nl/onderzoeken/archief/1.04.02/invnr/1727/file/NL-HaNA_1.04.02_1727_0369 (consulté le 1er avril 2023). Le texte néerlandais (avec modernisation de l'orthographe) se lit comme suit : « een persoon van een middelmatig stature, doch wat schraal van lichaam en tronie met een hoog rand neus en grijzen baard, en na aanzien in de vijftig jaren, wiens rechter pink tot even boven het derde of laatste lit afgezet of gekapt scheen te wezen. ».

[7] William Dampier, A New Voyage Round the World (Londres: James Knapton, 1697), p. 284.

[8] Thomas Murray, William Dampier, v. 1697-1698, huile sur toile [749 x 629 mm], National Portrait Gallery (Londres), NPG 538 [en ligne] https://www.npg.org.uk/collections/search/portrait/mw01706/William-Dampier? (consulté le 1er avril 2023). C'est une image réduite de cette peinture qui est reproduite ici. Il s'agit vraisemblablement de la seule représentation d'après nature d'un flibustier qui soit parvenu jusqu'à nous.

[9] AGI LIMA/484/fol. 138, cité dans José Francisco Buscaglia Salgado, « Infortunios de Alonso Ramírez (1690), o del naufragio que le abrió a América el mundo », La Habana Elegante: segunda época, no. 50 (automne-hiver 2011), dos. 2 [en ligne] http://www.habanaelegante.com/Fall_Winter_2011/Dossier_Buscaglia.html (consulté le 1er avril 2023). L'extrait pertinent se lit comme suit : « el capitán de mar y guerra, piloto mayor del navío grande, se llama Guillermo Dampier, que será de sesenta y quatro a sesenta y seis años de edad que ha estado en este mar otras veces y en una de ellas perdió el dedo meñique de la mano derecha... ».